Catégorie : Rapport d’activité
Entretien avec Jean-Philippe Vachia, président de la CNCCFP
« Nous faisons dans ce rapport d’activité 18 propositions pour renforcer les moyens de contrôle et de sanction de la Commission, pour protéger les financements politiques des ingérences de toutes sortes et pour simplifier, clarifier et unifier les dispositions applicables. Par exemple, interdire aux personnes physiques étrangères ne résidant pas en France de consentir des prêts aux candidats et aux partis. »
Quelle est la spécificité du financement des élections européennes ?
Trois points sont à relever.
La loi du 7 juillet 1977 a prévu un plafond de dépenses de campagne spécifique pour cette élection : 9,2 millions d’euros. Dès lors, le montant maximum du remboursement de l’État s’élève à 4,37 millions d’euros. Les budgets de campagne seront sans doute en pratique d’un montant très variable, si l’on tire les leçons de l’expérience du scrutin de 2019.
Ensuite, le remboursement de l’État est accordé aux listes de candidats ayant obtenu un minimum de 3 % des suffrages exprimés, contre 5 % dans le cas général. Mais attention : le pourcentage minimum pour obtenir des sièges au Parlement européen est, quant à lui, de 5 %.
Enfin, désormais, toutes les listes devront déposer un compte de campagne alors que, dans le cas général, les candidats ayant obtenu moins de 1 % des suffrages exprimés en sont dispensés. Ce sont ainsi 38 comptes de campagne que nous attendons, à déposer au plus tard le 16 août prochain.
Les comptes et leur dépôt sont désormais dématérialisés. Quelles sont les conséquences sur le travail de la Commission ?
Oui, le dépôt des comptes de campagne se fera de manière dématérialisée sur notre plate-forme « Fin’Pol », que nous avons utilisée pour la première fois pour l’élection présidentielle de 2022. Nous avons tiré les leçons de cette expérience et avons amélioré, avec notre prestataire, le fonctionnement de la plate-forme.
À terme, nous visons une numérisation généralisée du dépôt des comptes de campagne et de ceux des partis politiques. Avec la disparition du papier, le contrôle des comptes s’en trouve transformé et les opportunités de l’outil informatique sont mises à profit pour, à la fois, faciliter pour le candidat le dépôt de son compte et ses échanges avec la Commission, et pour celle-ci approfondir l’examen des comptes et favoriser une approche globale et comparative de ceux-ci.
Enfin la plate-forme est aussi destinée à livrer nos décisions et ensuite à les communiquer aux demandeurs.
Quels sont les moyens supplémentaires dont aurait besoin la Commission ?
En conclusion de notre rapport nous présentons 18 propositions pour renforcer les moyens de contrôle et de sanction de la Commission, protéger les financements politiques des ingérences de toutes sortes et pour simplifier, clarifier et unifier les dispositions applicables.
Je vous donnerai quatre exemples : nous permettre d’avoir connaissance des comptes des partis politiques de l’année n pendant que sont instruits les comptes des candidats qu’ils ont soutenus lors d’une élection ; nous conférer un droit de communication envers les fournisseurs et prestataires des candidats afin de mieux contrôler les factures ; ajouter la CNCCFP à la liste des destinataires d’informations de TRACFIN, ce qui serait très utile en cas de doute sur l’origine des fonds recueillis par les candidats ou les partis ; interdire aux personnes physiques étrangères ne résidant pas en France de consentir des prêts aux candidats et aux partis (en s’alignant ainsi sur les exigences posées par la loi pour les donateurs).
Les missions de la Commission
Contrôler les comptes de campagne des candidats aux élections
Sur le plan électoral, l’année 2023 a été une année de transition entre l’année 2022 marquée par les deux grandes échéances qu’étaient les élections présidentielle et législatives et l’année 2024, année de l’élection des représentants au Parlement européen. Le contrôle des comptes des candidats aux élections sénatoriales est le sujet majeur propre à 2023 : la CNCCFP constate une meilleure appropriation des dispositions encadrant le financement des campagnes électorales, alors que les candidats y sont soumis maintenant depuis 10 ans. L’élection à l’Assemblée de Polynésie française d’avril 2023 a permis de faire ressortir le sujet toujours délicat des frais de transport des candidats qui appelle une remise à plat.
La CNCCFP expose comment elle s’est préparée à l’échéance électorale des européennes de juin 2024 : comme pour l’élection présidentielle de 2022, le dépôt des comptes de campagne (au plus tard le 16 août prochain), entièrement numérisés, se fera sur la plate-forme Fin’Pol.
La question des emprunts des candidats auprès des personnes physiques est à nouveau abordée et suscite des propositions de réforme.
Vérifier le respect par les partis politiques de leurs obligations comptables et de la licéité de leurs ressources
S’agissant des partis politiques relevant de la loi du 11 mars 1988, la CNCCFP a publié son avis sur les comptes de plus de 530 partis au JO du 9 février 2024. Cette année, l’accent est mis sur l’aide publique directe et indirecte de l’État. Sur les 200 millions d’euros de ressources environ, l’aide publique directe de l’État (66 millions d’euros), qui est globalement stable depuis de nombreuses années, et l’aide indirecte (avantage fiscal accordé aux contribuables à l’impôt sur le revenu à hauteur de 66 % des dons ou cotisations, soit au final de l’ordre de 50 millions d’euros) représentent largement plus de la moitié des ressources financières des partis politiques. La CNCCFP invite à s’interroger sur les voies possibles d’évolution des dispositifs actuels.
Pour la première fois de manière systématique, la CNCCFP s’est livrée a posteriori à un rapprochement des comptes 2022 des partis politiques tels que déposés auprès d’elle le 30 juin 2023 et des comptes de campagne des candidats des scrutins de 2022 qu’elle avait approuvés avec ou sans réformations ou modulations en décembre 2022. Elle en tire des enseignements utiles pour l’avenir, alors même que ce rapprochement est moins aisé qu’on pourrait le croire. Il est pourtant indispensable et devrait être surtout possible en temps réel.
Les 18 propositions de la CNCCFP
Comment mieux lutter contre les financements occultes et simplifier les obligations des candidats et des partis politiques ?
Face aux défis accrus, tels que le risque de financement illégal par des personnes morales et d’ingérences de toutes sortes dans les campagnes électorales via les réseaux sociaux ou le recours aux emprunts auprès de personnes physiques sans que la Commission ait connaissance de l’origine des fonds prêtés, et avec le souhait, par ailleurs, de simplifier certaines procédures, plusieurs évolutions pourraient être envisagées. Aussi la Commission présente-t-elle 18 propositions de réforme :
La Commission présente son rapport d’activité 2023.
Le dernier rapport d’activité de la Commission est disponible sur le site au format PDF. Il couvre l’année 2020.